Par Suzanne Sendel
En mettant en lumière celles et ceux qui vont au-delà des attentes, un nom s’impose : Jessica Fraser — une figure inspirante dont le parcours sillonne le Canada et les États-Unis au service des plus grandes marques de lunetterie indépendante.
Avec plus de trente ans d’expérience, Jessica incarne l’essence même de la Rockstar Road Warrior — une routière du style dont l’ardeur ne faiblit jamais.
Chaque année, elle travaille entre 200 et 220 jours sur la route pour représenter avec fierté les marques Bevel et Blake Kuwahara, couvrant l’Alberta, la Saskatchewan, le Manitoba et l’Ontario, en plus de plusieurs États américains : l’Illinois, le Michigan, le Wisconsin, l’Indiana, l’Ohio, Washington D.C., la Virginie et le Maryland. Avec tant de nouvelles boutiques indépendantes qui émergent, elle pourrait pratiquement planter sa tente en Ontario. Et elle ne s’en plaindrait pas : Jessica adore le Canada et la clientèle exceptionnelle qu’elle y côtoie.
Une carrière née de la curiosité
C’est à Long Beach, en Californie, que tout a commencé, derrière un bureau comme adjointe administrative, à gérer des réclamations d’assurance pour une boutique d’optique. Rapidement, elle passe à l’ajustement de montures et découvre sa vocation : transformer des visages et des vies par le biais du stylisme optique.
Deux ans plus tard, elle rejoint la boutique Optical Shop of Aspen, dirigée par Larry Sands, un pionnier de la lunetterie haut de gamme. L’entreprise exploitait 28 boutiques et distribuait des marques telles que Chrome Hearts et Matsuda. Jessica grimpe les échelons, passant de la vente à la gestion de plusieurs succursales au cours des neuf ans avec la compagnie.
Elle travaille aussi bien dans le commerce de détail que dans le secteur de la distribution, devenant opticienne certifiée à Santa Monica. À la demande de Larry Sands, elle s’installe pendant un an dans son condo à Aspen pour y diriger une boutique prisée par les célébrités.
Animée par une ambition tranquille mais constante, elle revient à Newport Beach, puis s’installe à Santa Fe pour y occuper un poste de direction.
Parmi ses séances de stylisme les plus mémorables : Harrison Ford et Nicolas Cage.
En seulement deux ans, elle contribue à faire passer le chiffre d’affaires de la boutique locale de 500 000 $ à 2 millions $.
Elle est ensuite mutée à La Jolla pour ouvrir une nouvelle boutique, avec la promesse d’un poste d’adjointe à la direction du marketing, des ventes et de la promotion. Mais après la vente de l’entreprise à Oakley, puis à Luxottica, la promotion attendue n’arrive jamais. Ses trajets quotidiens de deux heures deviennent exténuants.
Et si le monde des célébrités avait son attrait, le changement de culture d’entreprise pousse Jessica à emprunter un nouveau chemin : celui de représentante pour Robert Marc et Lunor.



Braver les doutes, adopter la vie de représentante
Au début de sa carrière, Jessica envisage de passer du commerce de détail à la distribution, mais une gestionnaire tente de la dissuader, affirmant — ironie du sort — que les femmes représentent un risque en raison des grossesses potentielles… et que les sacs d’échantillons sont trop lourds pour elles.
Des années plus tard, après avoir été témoin de promesses non tenues et de multiples changements d’entreprise, Jessica adopte pleinement la vie de représentante, portée par sa passion inébranlable pour la mode, le style et le luxe.
Elle accepte son premier poste de représentante alors que la récession frappe — et parvient malgré tout à s’épanouir dans ce rôle.
Par la suite, elle est approchée par Ramassia, distributeur de la marque Theo, pour couvrir la côte Ouest des États-Unis, du Texas jusqu’au Wyoming, ainsi qu’une grande partie de l’Ouest canadien.
Après neuf années de succès, elle repart vivre au Michigan pour accompagner son père dans une période de déclin de santé.
Puis vient sa rencontre avec Richard Mewha et Claudio Arena. Elle rejoint Bevel et Blake Kuwahara, couvrant cette fois l’Est américain, l’Ontario, le Québec et la Nouvelle-Écosse. Après sept ans dans ce rôle, son empreinte dans l’industrie est plus marquante que jamais.

Une vie au-delà des frontières
Jessica a construit une carrière parsemée d’épreuves et de réussites.
Parmi les plus grandes déceptions : découvrir qu’elle était payée moins que ses collègues masculins.
Les passages fréquents aux douanes lui ont aussi révélé les réalités du profilage racial, avec des attentes pouvant s’étirer de 15 minutes à plus de deux heures.
L’accès aux soins de santé représente un autre obstacle majeur.
Aux États-Unis, les représentants indépendants doivent assumer eux-mêmes le coût de leur assurance — souvent près de 700 $ US par mois pour une couverture limitée.
Jessica juge cette situation profondément injuste, surtout compte tenu des effets physiques du travail sur la route. Gérer plusieurs territoires sans accès à un régime universel ou à une assurance collective ajoute un niveau de complexité supplémentaire à un métier déjà exigeant.
Malgré tous ces défis, Jessica continue de faire rayonner le marché de la lunetterie de luxe avec une rare combinaison d’élégance et de ténacité.
Sa chaleur humaine, sa profonde connaissance de l’industrie et son engagement sans faille en font une figure chérie et respectée dans tout le milieu.
Passionnée d’art – elle a étudié l’histoire de l’art à l’université – elle aime aussi lire, écrire et les sports, surtout le hockey.
Fervente partisane des Red Wings de Detroit, elle n’hésite pas à encourager les équipes canadiennes, et suit de près les performances des Jets de Winnipeg.
Le parcours de Jessica Fraser est une ode à la persévérance, à la résilience et à la passion — un exemple éclatant de ce que signifie tracer sa propre voie dans l’univers de la lunetterie indépendante.
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